Michèle FREUD
Psychothérapeute, Praticienne en EMDR et en thérapies brèves

Formations

Facebook
Tél : 04 94 40 44 71
accueil > Chroniques> ACCEPTER DE BIEN VIEILLIR


 

 

ACCEPTER DE BIEN VIEILLIR



S’il est vrai que la vieillesse peut se révéler être une période féconde et intense de la vie, il nous faut reconnaître, dans une société où le jeunisme fait loi, qu’il n’est pas bon de se sentir vieillir.
Dès la cinquantaine, on sent planer le spectre de la retraite et de la mise au rancart. 50 ans, c’est l’âge où vous êtes classé dans la catégorie des séniors....Comment négocier cette nouvelle tranche de vie ?
Nous vieillirons tous, c’est une réalité incontournable, que nous le voulions ou non. Chaque jour qui passe nous rapproche d’une autre tranche de vie que l’on appelle « l’âge d’or ». Certains l’acceptent et semblent vieillir en beauté, alors que d’autres se réfugient dans la plainte, la rancœur ou la colère contre tout un système dont ils se sentent de plus en plus exclus.
Aucun processus autre que le vieillissement ne sollicite autant la capacité à devoir composer avec nos pertes et nos deuils.
Il nous faut pourtant accepter cette étape et savoir que la maturité est susceptible d'être aussi porteuse de sagesse et de dignité.

Repenser sa vie, en couple, ou en solo ?

En couple, il peut s’agir parfois d’une aventure héroïque relèvant même de l’exploit où il faut apprendre à cohabiter à deux sur un mode différent puisque l’on se retrouve en permanence ensemble, et imaginer des moyens de respirer pour éviter l’inéluctable érosion.
« Depuis que mon mari a pris sa retraite, je suis complètement déstabilisée, il est là, à temps plein, et c’est pesant. Je ne me rendais pas compte auparavant de la liberté qui était la mienne. Tout à coup, je me sens étouffée par sa présence permanente. » narre Doriane.
Il faut en effet s’adapter, être prêts aux concessions, aux inévitables compromis. La femme voit son domaine soudain investi par son mari. Lui, perdant son identité sociale, de plus en plus émasculé dans sa vie conjugale, a besoin de se situer, ne sait où se réfugier et finit par se sentir en trop. Les conflits éclatent pour des petits riens et l’ambiance devient vite délétère. Il se met à regretter ce passé où, dans sa profession, il se sentait reconnu dans sa fonction. Alors, se repliant dans son monde, il tente d'élaborer son nouvel espace de vie.
« Mon mari s’est aménagé une pièce où il passe ses journées à pianoter devant son ordinateur, il est connecté en permanence sur Internet et communique avec le monde entier, sauf avec moi. Je ne le vois qu’à l’heure des repas, ce n’est pas ainsi que j’envisageais la retraite, il ne bouge même plus de sa chaise ! » se plaint Ariane.
C’est le temps des bilans, mais aussi des crises. On se cherche, on n’arrive plus à se retrouver et on se demande même s’il ne faut pas se quitter ou encore consulter un spécialiste car le sexe ne fonctionne plus.  Conserver une vie sexuelle active n’est pas forcément évident malgré la pression sociale vantant l’immortalité du désir. Les troubles sexuels liés à l’âge sont susceptibles d’être légion chez les deux partenaires. Pourtant, certains couples enfin disponibles l’un pour l’autre, découvrent le plaisir d’une nouvelle sexualité dans un système d’échanges différents et vivent ce moment dans un plein épanouissement.
Selon les sondages, dans la majorité des couples qui prennent de l’âge, la sexualité n’occupe pas une place dominante. Il y a dans ce domaine, des attentes inégales. Pour certains, elle est essentielle, pour d’autres totalement accessoire. Bien qu’elle perdure après l’âge de la retraite, elle se modifie dans une continuité dynamique, le plaisir du couple se mue en un désir de partager, d’être ensemble, dans une tendresse et une complicité réciproques, pas forcément au travers d’un rapport sexuel.

En solo, on doit faire face à la solitude avec beaucoup de temps pour soi, quelquefois, le trop de solitude est là, présent, écrasant et douloureux ! C’est souvent l’heure des bilans et des interrogations : avons-nous fait le bon choix en restant seul ? Faut-il continuer à cheminer en solo sur cette route encore longue ? Autant de questions auxquelles on ne trouve pas forcément de réponse.


Crainte phobique de vieillir, départ des enfants, maladie, décès des proches, souvent de ses parents, perte de son intégrité physique voire psychique, vécue comme un affront à sa vigueur d’autan, sont autant de matins chagrin et d’épreuves à traverser durant cette période. Même s'l est possible d’atténuer provisoirement les signes de vieillissement, malgré tous les progrès, on ne peut rien contre la fuite du temps.
Certains, vivant difficilement leur effondrement narcissique, décident d’abdiquer, préférant la solitude, comme Pierrette qui, à 59 ans, a cessé toute activité sexuelle « de peur de montrer une image trop dégradante », dit-elle.
D’autres se font une raison, parviennent à faire le deuil de leur éternelle jeunesse et, dans un processus d’acceptation, inventent de nouveaux lieux de sublimation où l'on apprend à porter sur le monde, sur la vie et sur la leur, un regard plus attendrissant.
Faire le deuil des pertes inhérentes à cette tranche de vie serait plus facile à concevoir si la sagesse, l’expérience et la créativité étaient davantage glorifiées dans notre société. En Asie, par exemple, la femme vieillissante est particulièrement vénérée car elle symbolise l’expérience, la connaissance de soi, le partage, et la transmission des traditions, aussi les cas de dépression dus à la ménopause sont-ils quasiment inexistants. À quand un rite officiel visant à célébrer le passage de cette rive à l’autre ?


Bien vieillir, existe-til un mode d'emploi ?

Il est prouvé que les personnes qui adoptent une attitude positive face à cette période la traversent de façon plus sereine avec une motivation accrue pour toutes les choses de la vie. L’épanouissement peut être atteint par divers moyens, certains en couple ou seuls, trouvent leur bonheur en s’impliquant davantage dans leur vie familiale, en cultivant l’art d’être un aïeul aimant, en s’investissant dans des projets créatifs, en se découvrant de nouveaux passe-temps. Tous ces centres d’intérêts nourrissent l’intériorité psychique et écartent les risques d’effondrement de soi liés à la contrainte de l’âge.
Souvent, on vieillit, comme on a vécu : dans la tristesse ou la joie, dans la solitude ou l’action, dans la critique ou l’acceptation.
« La vraie sagesse pour moi est de renoncer au renoncement, ne pas limiter ses appétits. Le consentement à une vie amoindrie est une mort prématurée ». écrit Pascal Bruckner, philosophe dans Une brève éternité : philosophie de la longévité, Éd Grasset.

Et si la recette du bien vieillir  résidait dans la force de chacun à aimer la vie, envers et contre tout ? Ecouter son corps pour se soigner à temps, prévenir pour mieux combattre les grands maux qui la rendent pénible, s’alimenter sainement, garder le goût de l’effort, l’envie d’aller de l’avant… lui donner un sens, prendre intérêt et plaisir à ce que l’on fait. Avec l’âge, on sait mieux discerner ce qu’il est précieux de sauvegarder, possible d’espérer et déraisonnable de convoiter.
Vieillir, c’est accepter de vivre chaque moment dans la simplicité, c’est aussi sublimer son quotidien avec la capacité de se remémorer ses multiples expériences heureuses et se souvenir combien la vie nous a donné et que, même si ces choses ne sont plus, nous en avons bien profité.

*Par Michèle Freud, psychothérapeute, Directrice de Michèle Freud Formations
Voir ses ouvrages
Voir les Formations



Lire toutes nos chroniques

Tous droits de reproduction soumis à autorisation de l'auteur.